Pôle Soummam

Photo-reportage : L’oléiculture à Béjaïa, Bouira et Tizi Ouzou

En décembre 2020, une équipe de photographes s’est rendue dans les wilayas de Béjaia, Bouira et Tizi Ouzou et a accompagné l’équipe du Pôle Soummam dans son quotidien : visites d’huileries traditionnelles et modernes, rencontres avec plusieurs figures du monde professionnel et associatif oléicole, découverte des oliveraies…

Le reportage qui s’est déroulé durant la période de récolte a été l’occasion de rencontrer celles et ceux qui animent chaque jour la filière et d’illustrer la diversité des pratiques oléicoles et des paysages kabyles.
 

De l’huilerie traditionnelle...

Huilerie traditionnelle, Ait Zellal (Tizi Ouzou) – Comme la majorité des huileries de Tizi Ouzou, l’huilerie de Mr. Hamid Fitas est une huilerie traditionnelle familiale. L’huilerie compte beaucoup de clients dans la région.



Les olives sont livrées et stockées dans des caissettes ajourées. Plutôt que des sacs en jute ou en plastique, ce système est privilégié car il permet d’aérer les olives entreposées et d’éviter leur fermentation.

Mise en bouteille

Mme Kaissa Fitas met en bouteille l’huile produite. Les bouteilles en plastique ainsi remplies sont rarement étiquettées : la production a vocation à être consommée par l’entourage proche.









Khfaf à l’huile d’olive – L’huile produite est aussi utilisée pour préparer les khfaf, beignets traditionnels algériens à la semoule.

Salaison et broyage des olives

Ait Zellal (Tizi Ouzou) – De l’eau chaude est versée dans la cuve où sont broyées les olives afin de rendre la pâte plus fluide et de favoriser l’extraction de l’huile.

Le sel est souvent utilisé afin de mieux préserver les olives dont le temps de stockage est supérieur à 7 jours. Cette pratique courante repose sur la croyance selon laquelle le sel prévient l’apparition de micro-organismes et permet de conserver la qualité du fruit. Cette étape n’est toutefois pas nécessaire.

A l’huilerie moderne

Huilerie moderne Ibaliden, Bouhamza (Béjaïa) – La grande majorité des huileries effectuent de la prestation de service. Au niveau de la subdivision d’Akbou, 80% de la production d’huile d’olive est retournée aux propriétaires d’olives. Les 20% restants de la production d’huile sont issus soit des olives achetées par l’oléifacteur ou de sa propre production d’olives. L’huilerie Ibaliden existe depuis trois générations.

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Livraison des olives

Comme beaucoup d’oléifacteurs, l’huilerie de Mr. Ibaliden assure le transport des olives de l’exploitation jusqu’au moulin. Certains oléifacteurs proposent également d’assurer la livraison de l’huile ou la mise en bouteille.

Effeuillage des olives

Depuis la première cuve où les olives ont été déversées, elles sont transportées vers l’unité d’effeuillage sur un tapis à tasseaux incliné. Les tasseaux permettent d’éviter l’accumulation des olives et de mieux les répartir. Cette opération préliminaire d’effeuillage des olives contribue à obtenir une huile de meilleure qualité : quand les feuilles sont triturées avec les olives, elles détériorent la qualité et la conservation de l’huile produite.

Nettoyage et malaxage

Une fois effeuillées, les olives que reçoit l’huilerie passent dans une laveuse hydropneumatique pour être lavées des impuretés présentes (terre, poussière) qui réduisent la qualité de l’huile produite.

Après avoir été broyées, les olives sont malaxées afin de permettre aux arômes d’exhaler et aux gouttes d’huile de s’agglomérer. L’opération dure en moyenne 20 minutes. Les cuves sont en acier inoxydable.

Phase de séparation

Huilerie Ibaliden, Bouhamza (Béjaïa) Mr. Ibaliden senior contrôle la qualité de l’huile produite. Après décantation, les résidus d’eau et de solides, qui se trouvent au fond de la cuve du fait de leur plus forte densité, doivent être séparés de l’huile.

Rejet des grignons

Les particules solides issues des processus de broyage, malaxage et d’extraction, sont déchargés à l’extérieur de l’huilerie. Les huileries gardent les sous-produits (margines et grignons) qui peuvent être utilisés comme combustibles ou comme amendement organique. La valorisation de ces sous-produits est une problématique essentielle pour la préservation de l’environnement : ces sous-produits agricoles sont parfois rejetés directement dans la nature ou dans les oueds et contribuent à polluer les sols et les eaux.

En passant par la super-presse






Huilerie Mouloud Mebarki, Mchedellah (Bouira) – La superpresse permet le pressage des olives en une seule opération à l’aide de presses à haute pression hydrauliques. Cette méthode qui a connu une diffusion importante dans tout le bassin méditerranéen dans le courant des années 1950 permet d’améliorer le rendement d’extraction d’huile en diminuant le temps et le nombre d’opérations de pressage nécessaires, comparativement aux presses à énergie humaine, animale ou mécanique. Ce système tend à présent à être remplacé par les méthodes d’extraction en continu.

Broyage des olives

Les olives sont d’abord broyées par deux meules de pierre dans un mouvement de rotation lent. Cette étape peut durer une quarantaine de minutes.

Remplissage des scourtins

La pâte d’olive est disposée à la main dans des paniers (scourtins) superposés. Quand la presse est actionnée, l’huile et les margines (eaux contenus dans les olives) filtrent à travers les scourtins et s’écoulent jusqu’à une cuve de décantation au niveau de laquelle l’huile et l’eau de végétation seront séparées.

La récolte

Domaine Hamimi, Tazmalt (Béjaïa) – Mr. Mansouri Hacene, employé du domaine Hamimi, récolte les olives à la main ou à l’aide d’un peigne vibreur pour les plus hautes branches. Le gaulage est souvent déconseillé : en frappant et en cassant les branches chargées de fruits, on peut endommager les olives et compromettre la production fruitière de l’année suivante.

Formation aux bonnes pratiques de la récolte

Domaine Hamimi, Tazmalt (Béjaïa) – Plusieurs conseillers, accompagnés et équipés par le PASA, ont animé une session de formation sur les bonnes pratiques de la récolte. Les travailleurs du domaine Hamimi ont notamment pu se former à l’utilisation des peignes vibreurs.



45 conseillers seront formés par le PASA dans l’objectif de renforcer les services de conseil agricole, de vulgarisation et de formation à destination des oléiculteurs et des oléifacteurs de Béjaïa, Bouira et Tizi Ouzou.


En améliorant ainsi l’offre d’appui-conseil sur la région de la Soummam, le programme, financé par l’Union Européenne et mis en œuvre par Expertise France, entend améliorer les performances de la filière oléicole en Kabylie.


A la rencontre des oléicultrices

Bouzguen (Tizi Ouzou) – Au sein de la filière oléicole et notamment à Tizi Ouzou, les femmes jouent un rôle de premier plan et sont présentes à toutes les étapes de la production et de la transformation. A Tizi Ouzou où l’oléiculture traditionnelle domine, la main d’œuvre est majoritairement féminine. A Bouzguen, rencontres avec plusieurs femmes oléicultrices qui,  fédérées en association, ont mis en place et financé grâce à leurs profits un dispensaire de soins.

Les femmes récoltent les olives à la main. Elles se chargent de ramasser les fruits tombés au sol avant de poser les filets sous les arbres à récolter. Penchées au sol ou juchées en haut de l’olivier, elles fredonnent en chœur des chants traditionnels berbères comme « Assa Tiwizi anleqdh azemour » (“Aujourd’hui volontariat de la récolte d’olives”).

Souvent pratiqué en cas de récolte tardive, le ramassage des olives au sol est déconseillé : l’olive est souvent abîmée et peut présenter des traces de contamination à la mouche de l’olive.

Les olives sont transportées depuis le lieu de la récolte dans des paniers tressés ou des sacs en jute.

Entretien du verger

La main d’œuvre pour la récolte s’est raréfiée, du fait du départ des plus jeunes générations vers les villes. L’entretien du patrimoine oléicole repose ainsi sur les aînées.

Les branches les plus basses sont parfois taillées pour diminuer la frondaison de l’arbre et éviter le développement de maladies ou la diffusion des ravageurs. Cette opération délicate contribue à la longévité de l’oliveraie et à l’amélioration de la productivité des arbres.




Trituration


Après avoir effeuillé manuellement les olives, les femmes transportent leur récolte jusqu’à une meule en granit, actionnée au moyen d’un bras attelé à un âne.

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Production de savons

La valorisation des sous-produits est une source de diversification de revenus pour les oléicultrices. Utilisée en savonnerie, l’huile d’olive a des propriétés adoucissantes pour la peau. La production de savons est une activité majoritairement féminine, encore peu développée dans la filière oléicole.




Protéger la biodiversité

Si aujourd’hui les trois wilayas du projet ne sont que peu confrontées à des difficultés d’accès à l’eau, on observe toutefois depuis plusieurs années une pollution croissante liée au rejet dans les cours d’eau des margines (eau issue de l’extraction de l’huile) et des grignons (peau, pulpe pressée et noyau de l’olive). La réglementation n’est souvent pas respectée, les moulins ne disposent pas des équipements et n’appliquent que trop peu les pratiques d’élimination de ces sous-produits polluants.

Au niveau des exploitations oléicoles, le recours a l’irrigation demeure rare mais pourrait augmenter dans un contexte de diminution de la pluviométrie et d’augmentation des températures estivales. Les oliveraies sont en première ligne de ces phénomènes, notamment des incendies, et nombre d’oléiculteurs se sentent désarmés. Le recours a l’irrigation d’appoint pourrait s’étendre, posant la question de la gestion des ressources hydriques dans la vallée de Soummam.


Valorisation des grignons

Station de biocompost, El Kseur (Béjaïa) – Mr. Amzal Rabah présente le processus de valorisation de grignon (noyau, pulpe, peau) d’olive : une fois mélangés à d’autres déchets verts broyés et fermentés, les grignons constituent un substrat organique riche.



Des fraisiers ont été plantés à partir des sacs de compost de grignons. Les sous-produits (feuilles, grignons) peuvent être compostés pour produire de l’engrais.