Pôle Soummam

Interview d’Imen Smaili, ingénieur agronome et cheffe de mission sur l’étude de marché et de consommation sur l’huile d’olive

Qui êtes-vous et quel est votre rôle dans l’enquête ?

Je suis Cheffe de mission sur la partie relative à l’étude de marché et de la consommation de l’huile d’olive de la Kabylie du projet PASA. Mon rôle est de coordonner l’étude et de veiller à son bon déroulement. Je coordonne une équipe d’experts recrutés dans le cadre de ce projet par PwC et Expertise France. Chacun dans son domaine, apporte sa connaissance et son expérience pour restituer le plus fidèlement possible une image sur le marché et les habitudes de consommation de l’huile d’olive en Algérie.

En quoi consiste cette enquête ?

C’est une enquête inédite, qui sera menée avec notre partenaire IMMAR, en Algérie qui dispose de l’expérience et des ressources pour mener une enquête de cet envergeure.

Nos objectifs consistent à faire une étude quantitative et qualitative du marché de l’huile d’olive. Nous nous intéresserons à la qualification des circuits de commercialisation et de distribution de l’HO. Cette enquête vise essentiellement les moulins/oleifacteurs avec les deux modes de production pratiquées : traditionnelle et moderne au niveau des régions de Bouira, Béjaia et Tizi Ouzou.

Pour l’enquête grande consommation, nous interrogerons 1500 ménages répartis sur la région de la Kabylie mais aussi dans les grandes métropoles comme Oran, Alger et Constantine.

D’autres wilayas seront concernées comme Saîda, Batna, Chlef et Ghardaia. Nous souhaitons caractériser les pratiques d’achat et les habitudes de consommation de nos consommateurs algériens. Nous consacrerons une partie de l’enquête aux attentes des consommateurs en matière de gout, de prix, de packaging mais aussi à leur attachement aux critères comme l’origine et le mode de production. Ces enquêtes seront enrichies avec un test de dégustation pour identifier les critères « organoleptiques » qui déclenchent l’achat (acidité, couleur, odeur).

La Diaspora est concernée par cette étude, elle constitue un levier de valorisation important à l’étranger.

Quel est l’intérêt de cet exercice pour le PASA ? Et pour la filière oléicole ?

Cet exercice apporte une parfaite connaissance des habitudes de consommation, des pratiques d’achat et des circuits de distribution « informels »  qui vont garantir une information objective et une analyse pertinente pour répondre aux objectifs du projet PASA à savoir le renforcement de la filière oléicole.

Un plan stratégique et un plan marketing seront proposés  pour valoriser ce produit du terroir sur le marché domestique et sur le marché de l’export très normé. Cette étude nous révèlera le potentiel d’un produit agricole fortement attaché à un terroir ! C’est un vrai défi à relever !

Comment concrètement allez-vous procéder ? Quelles sont les différentes étapes ?

Nous profitons de la période automnale qui correspond à la nouvelle campagne de collecte et de trituration des olives pour démarrer les enquêtes terrain sur la Kabylie et sur les autres wilayas.

Nous travaillons en collaboration et en parfaite synergie avec Expertise France et le comité de suivi en Algérie pour valider à chaque étape nos outils d’investigation. 

4 étapes marquent notre méthodologie d’étude :
L’état de l’art et synthèse bibliographie qui apportent des connaissances sur la filière et son importance socio-économique. Ensuite, le lancement opérationnel des enquêtes, et traitement de données. Pour l’étape trois, nous procèderons à l’analyse approfondie des études de marché et de consommation, à l’identification des marchés cibles nationaux et internationaux et à la proposition d’un plan marketing. La restitution des résultats de l’étude constitue la dernière étape.

Cette enquête est-elle inédite en Algérie ? Pourquoi ?

A ma connaissance, aucune enquête de cette ampleur n’avait été menée sur la consommation de l’huile d’olive. De par la taille de l’échantillon qui est importante, nous nous intéresserons à la qualification des choix des consommateurs, la segmentation du marché et les circuits de commercialisations seront également interrogés. Notre enquête se démarque également car elle s’intéresse à d’autres zones urbaines que la Kabylie. Le panel sera complété avec 300 enquêtes au niveau de la diaspora.

Avez-vous d’ores et déjà des hypothèses fortes sur les résultats de l’enquête ?

La littérature et les nombreux travaux réalisés documentent déjà ce schéma bien complexe dans un environnement informel mais qui fonctionne depuis longtemps. L’enquête ambitionne de confirmer ou pas ! Ces études en apportant davantage d’informations quantitatives et qualitatives. La politique nationale aujourd’hui souhaite mieux capter la valeur ajoutée.

Je ne souhaite pas biaiser les résultats, j’attendrai les analyses de l’enquête. Par contre en ma qualité de consommatrice, je suis convaincue que les algériens sont attachés à la dimension du terroir qu’ils associent au goût.

La fabrication artisanale est un levier d’achat fort pour les marchés domestiques / moulins et les points de vente spécialisés. Les consommateurs algériens et j’en fais partie citent naturellement la région de la Kabylie comme un pays producteur d’huile d’olive. Mais les variétés sont à l’heure actuelle encore peu connues. Ces productions sont plus connues par leur région de production que par leurs noms. Le test de dégustation affinera l’étude de consommation en apportant davantage d’information sur le choix et l’acte d’achat.

Pourquoi la diaspora est-elle enquêtée ?

La diaspora est importante notamment dans les pays d’Europe et d’Amérique du Nord. Elle est captive de certains produits du terroir comme l’huile d’olive et les dattes. J’observe également que la 2eme génération issue d’émigrés reste attachée à cette huile d’olive ! Pas étonnant quand elle est servie à table une bonne salade de poivron « felfel » accompagnée d’une galette kabyle « Aghroum akouren » aux odeurs du pays… La diaspora dispose d’un pouvoir d’achat intéressant et reste le meilleur ambassadeur de ce produit. Quoi de mieux qu’une expérience client réussie ?

En quoi est-ce que cette enquête va être utile pour les oléiculteurs et oléifacteurs ?

Les informations recueillies sont donc très intéressantes et vont permettre à la filière et aux acteurs économiques de se positionner collectivement pour mettre en place des stratégies commerciales plus pointues.

Il reste néanmoins beaucoup de travail à effectuer pour obtenir une meilleure reconnaissance de l’offre kabyle et notamment un vaste chantier sur les normes de qualité pour satisfaire au mieux la demande du marché domestique et celui de l’export.

Quand est-ce que l’étude se terminera ?

Nous pensons obtenir les premiers résultats de l’enquête fin 1er trimestre 2021. L’étude se termine courant mai 2021. Il est vrai que la situation sanitaire perturbe nos prévisionnels mais l’équipe des experts et moi-même feront de notre mieux pour respecter le planning (inchallah !)